À peine sortie de la côte encore saignante d’Adam, à son singulier amant costal, Ève ne prêta le flanc.
Les yeux encore enivrés des joyaux du jardin d’Éden, elle n’avançait que de guingois, à grand-peine.
Les amants platoniques s’observaient en chiens de faïence, incrédules, la poussière réchappant de leur solide mandibule.
Lui en son for : « Se croit-elle sortie de la cuisse de Jupiter
pour me déshabiller ainsi du regard, cette fille d’Éther ? »
Elle en son for : « Se croit-il premier moutardier du roi
pour me mirer de la sorte, ce pédant palefroi ? »
Observant la scène, Persifleur tenta de se montrer accort, ainsi
et de sa ruse, s’adonna à un maxi embrouillamini.
Jetant un œil salace aux nus callipyges, il dit:
« Êtres de chair, loin de vous concerner, la prohibition divine
retient, à vrai dire, les indélicats de ce fût qui domine.
De bestioles à bestiaux, nul mieux que vous ne saurait l’honorer.
À goûter au fruit défendu, soyez, donc, les premiers !
Pourquoi faire fi de joie ? »
L’ophidien fut fort aise de précipiter leur chute de sa fourberie
Il se dandina tant et plus, désireux de calter, qu’il tomba son exuvie.
Le même malveillant, quelque éon plus tard, laissera Abraham dévorer de ses yeux Agar l’Égyptienne
et jettera Sarah dans les cruelles affres de la cordiale peine.
Le même sadique lancera un sort à Lamek (Lamech)
pour transmuter le bigame en infanticide blanc-bec.
Mais pour l’heure, le fourbe posa rien de moins que la pierre angulaire d’une coulpe cosmogonique.
Il revint au Souverain Ultime qu’on dérogeât à Son injonction
qui, de Son courroux, sans maudire pourtant, lança condamnation :
Dorénavant, Serpent tomberait des nues et d’appendices de reptation serait pourvu.
Quant aux amants, ils ne feraient plus qu’un seul et seraient attifés de tourments jusqu’au linceul.
Depuis, Ève s’est vue affublée d’un utérus qui de co-naissances regorge
Et, autant le dire tout de go, Adam l’a encore en travers de la gorge.
Lynda Ainseur
Bonjour, Lynda,
Je le constate – et cela ne me pose aucun problème – : le niveau de vos dictées est plus élevé que celui de votre serviteur. Cela, d’ailleurs, concerne tous vos écrits sur votre blog. Quand je vous lis, je m’aperçois que je suis d’un prosaïsme assez affligeant. Mais, je le répète, je n’en suis aucunement peiné : grâce à vous, j’apprends, et c’est fort bien ainsi.
En ce qui concerne votre texte, donc, la licence poétique vous permet d’orner « souverain » d’une majuscule, bien sûr, mais, en toute rigueur, l’adjectif qui suit – arbitrairement, je le reconnais – n’a point doit à cette faveur, à l’instar de « République française », par exemple.
Pour ce qui est de « Son injonction » et « Son courroux », c’est la même chose : si l’on s’en tient à la lettre, l’adjectif possessif n’a pas le même privilège que « Il » et « Tu » quand on parle du Très-Haut, mais, là aussi, vous avez bien raison de laisser s’exprimer ladite licence.
Bien belle journée à vous,
Philippe
Auteur/autrice
Merci infiniment, Philippe. Je suis très touchée par ce commentaire. Il provient, à plus forte raison, d’une plume qui nous a gratifiés d’analyses très appointées et toujours originales des textes d’un certain Brassens que je redécouvrais à l’époque avec beaucoup de profondeur et de joie.
Merci infiniment pour ces corrections.
La poésie permet bien des dérogations, en effet, mais il se trouve que cette rubrique du blog est vouée à faire l’objet de retours et ajustements orthographiques, sémantiques… Ils sont, donc, pris en compte avec humilité, celle de ceux qui savent qu’ils ne savent rien 😉
Excellent après-midi, cher Philippe.